Si les marchés commencent à se stabiliser et les taux de production retrouvent lentement leur niveau avant la crise, les entreprises, elles, font face un autre défi plus préoccupant. La pénurie de main-d‘œuvre touche un grand nombre de secteurs surtout dans les pays industrialisés. Une situation qui pourrait s’empirer si des mesures efficaces ne sont pas prises. En effet, des études ont montré que d’ici 2023, un déficit de 85 millions de travailleurs qualifiés pourrait survenir. Comprendre ce qui provoque le manque de talents aiderait les parties prenantes à surmonter les difficultés qui en découlent. Mais quelles stratégies pour faire avancer les choses ? Découvrez dans cet article les causes, conséquences de cette pénurie ainsi que les bonnes pratiques à adopter pour l’atténuer.
Les facteurs clés du manque de main-d’œuvre
La problématique de pénurie de main-d’œuvre résulte de plusieurs facteurs qui peuvent se différencier d’un secteur à autre. Toutefois, à l’échelle mondiale, le vieillissement de la population, la migration des travailleurs, et le manque de compétences en sont les origines principales de cette situation.
Vieillissement de la population accompagné d’un faible taux de natalité
C’est un fait indéniable, le vieillissement de la population est la cause première de la pénurie de main-d’œuvre. Aux États-Unis par exemple, 10 000 personnes par jour atteignent l’âge de la retraite, un rythme qui pourrait se poursuivre jusqu’en 2029.
D’un autre côté, la population active de la Chine baissera de 20 % contre 40 % au Japon les vingt années à venir. En outre, des études ont montré que d’ici 2030, une personne sur six dans le monde sera âgée de 65 ans ou plus. Un nombre qui doublera sûrement d’ici 2050. À cela s’ajoute un faible taux de natalité dans de nombreux pays du monde.
Migration des travailleurs qualifiés
La migration des talents présente un ensemble de défis et d’opportunités pour les employeurs, car elle peut être considérée à la fois comme une perte et un gain. À la recherche de meilleures opportunités, les travailleurs qualifiés partent vers d’autres nations. Cela peut ainsi conduire à une fuite de cerveau et entraîner par la même occasion des lacunes importantes sur le marché du travail local.
Par contre, cette migration peut apporter de nombreux avantages aux pays d’accueil, notamment l’afflux de nouvelles compétences, une diversité accrue et un meilleur potentiel d’innovation. Ils peuvent ainsi renforcer leur main-d’œuvre sans supporter des coûts exorbitants.
Déficit de compétences et d’éducation
Une étude affirme que 87% des employeurs mondiaux admettent faire ou feront face à des problèmes de pénurie de compétences. Si la perte de compétences suite aux départs à la retraite des travailleurs est un facteur contributif, l’intégration des technologies avancées est la principale cause de ce manque de main-d’œuvre.
Certes, leur mise en œuvre nécessite l’acquisition de nouvelles compétences de la part des employés. Il en va de même pour les changements technologiques qui en découlent. À cet effet, il est plus qu’important pour les pays confrontés à ces défis d’investir dans l’éducation.
Les effets néfastes du manque de talents
Frein à la croissance économique
Savoir si la pénurie de talents contribue à l’inflation fait encore l’objet de grand débat, car beaucoup pensent qu’elle engendrera une hausse des salaires et des prix. Il est clair que si elle n’est pas maîtrisée, cette pression inflationniste pourrait provoquer une crise sévère qui prendra des décennies à se résoudre. Ce qui est sûr, un manque de talents persistant pourrait constituer sur le long terme une réelle menace pour la croissance économique d’un pays.
Plus de pression sur les entreprises
Une étude démontre qu’en 2021, 64 % des entreprises voient la pénurie de main-d’œuvre comme le principal obstacle à leur digitalisation. Le déficit de compétences les empêche effectivement d’adopter des technologies émergentes pour recruter des profils qualifiés.
En parallèle, le vieillissement de la population active les confronte à un vivier de talents de plus en plus restreint, dont les exigences et les capacités sont différentes de celles des plus jeunes. Par conséquent, les entreprises sont dans l’obligation d’adapter leurs processus de travail à ces derniers, mais surtout de faire preuve d’innovation et de mieux utiliser le marché du travail en interne tout en prenant en considération la main-d’œuvre étrangère.
Tensions sociales et géopolitiques
La pénurie de main-d’œuvre qui touche de nombreux pays à travers le monde n’est pas sans conséquence. En plus de freiner la croissance économique de ces derniers, elle peut également engendrer diverses tensions.
Sur le plan social par exemple, celle-ci peut conduire à une augmentation des inégalités au sein des entreprises, car les travailleurs qualifiés sont en mesure de négocier des salaires ou encore des avantages plus importants. D’un autre côté, l’immigration en masse peut engendrer une pénurie de logements et des soucis quant aux systèmes de santé et scolaires.
Sur le plan géopolitique, le manque de main-d’œuvre est susceptible d’aggraver les tensions entre les nations. En effet, pour combler leurs besoins en ressources humaines, les pays développés ont recours à la migration, chose qui peut déplaire aux pays d’origine des migrants qui voient leur population active diminuée progressivement et leur économie fragilisée.
Les solutions et stratégies à adopter pour faire face à la pénurie de talents
Investir dans une éducation et formation de qualité
Comme précisé plus haut, le déficit de compétences est une des origines du manque de talents. La meilleure solution est donc d’investir dans l’apprentissage des adultes, le recyclage, le développement des compétences et la formation continue. Par ailleurs, il est judicieux de flexibiliser les conditions de travail des employés afin de développer le savoir-faire interne.
Promouvoir la diversité et l’inclusion sur le marché du travail
Avec la mondialisation, l’essor de la technologie et l’évolution démographique, le besoin de diversité et d’inclusion sur le lieu de travail est devenu plus important que jamais. Face à la pénurie de main-d’œuvre, les entreprises doivent élargir leur perspective de recrutement et explorer des viviers de talents non traditionnels.
En effet, les organisations diversifiées et inclusives sont plus susceptibles d’attirer des candidats de différents horizons, avec une gamme plus large de compétences et d’expériences. Des études ont effectivement montré qu’en agissant de la sorte, ces dernières peuvent rester compétitives et innovantes dans des industries en évolution rapide.
Encourager l’innovation technologique
Si le développement des compétences et le recours à des travailleurs immigrants font partie des solutions aux défis de cette pénurie de main-d’œuvre, la technologie se voit comme une réponse pragmatique pour pallier ce problème avec succès. Certes, les innovations technologiques permettent d’optimiser le processus de certaines tâches et d’alléger le travail manuel des employés grâce à l’automatisation.
Réformer les politiques migratoires
Parce que la migration peut être un puissant moteur de prospérité et de développement comme l’affirme le directeur général de la Banque Mondiale, Axel van Trotsenburg, il est plus que nécessaire de reconsidérer les politiques migratoires pour prévenir des impacts sociétaux de la pénurie de main-d’œuvre. Pour ce faire, il est nécessaire d’instaurer une coopération bilatérale entre le pays d’origine et d’accueil.
En effet, lorsqu’elle est gérée correctement, elle profite aussi bien aux entreprises d’origine que celles de destination. Ainsi, les pays d’origine devraient réduire les coûts des envois de fonds, faciliter le transfert des connaissances de leur diaspora, renforcer les compétences de leurs citoyens, mais surtout protéger leurs ressortissants à l’étranger.
De leur côté, les pays d’accueil devraient non seulement faciliter l’insertion des migrants dans la société, remédier aux impacts sociaux de la migration, mais également permettre aux réfugiés de se déplacer et d’accéder au marché du travail.
Études de cas et exemples de bonnes pratiques pour pallier le manque de main-d’œuvre
L’Allemagne et la Suisse : deux pays qui ont réussi à atténuer la pénurie de main-d’œuvre
Plusieurs pays ont mis en place des politiques et des initiatives pour atténuer la pénurie de main-d’œuvre. Si certains n’ont pas obtenu de résultats concluants, d’autres voient le problème s’atténuer petit à petit.
L’Allemagne a par exemple investi massivement dans l’éducation et la formation de ses travailleurs. En promouvant la langue allemande, l’intégration des migrants dans le marché du travail est facilitée. En outre, les conditions de visa et séjour ont été simplifiées. Il en va de même pour la reconnaissance des qualifications étrangères.
De son côté, la Suisse opte pour un système d’apprentissage très développé qui permet aux jeunes de combiner formation en entreprise et cours en école professionnelle. D’ailleurs, elle encourage fortement la réinsertion sur le marché du travail en offrant à toutes les personnes la possibilité de suivre une formation continue.
Entreprises ayant mis en œuvre des stratégies efficaces
Si Transport RDL et E.B. Box ont fait face à des défis importants en matière de main-d’œuvre, ces deux entreprises ont su se relever et pallier leurs problèmes grâce à la technologie.
De par l’automatisation du tri, le processus opérationnel de l’entreprise Transport RDL est passé à la vitesse supérieure. Grâce à cela, elle a pu inaugurer un nouveau centre de tri plus performant qui vient remplacer ses deux anciens entrepôts.
Pour remédier au manque de main-d’œuvre, E.B Box a investi dans l’achat de nouvelles machines pour aider ses employés. D’ailleurs, elle a réduit le niveau de compétences requis afin de faciliter la recherche de personnel pour faire fonctionner ces dernières. Qui plus y est, elle a élargi son bassin potentiel de talents afin de développer l’entreprise plus facilement.
En conclusion
La pénurie de main-d’œuvre est une menace qui dure depuis longtemps et plusieurs pays du monde ne peuvent y échapper. Les causes en sont nombreuses, mais la baisse des taux de natalité et le vieillissement des populations en sont les facteurs principaux. Sans parler de la migration des travailleurs qualifiés, le déficit des compétences et d’éducation envenime encore plus cette situation. Si certains voient ce manque de talents comme un défi majeur à surmonter, il offre différentes opportunités pour d’autres. Toutefois, il est essentiel de prendre des mesures adéquates pour que cette pénurie s’atténue petit à petit. Pour ce faire, investissez dans l’éducation et développez les compétences de vos travailleurs. Encouragez la diversité et l’innovation, et offrez un environnement de travail inclusif pour une meilleure rétention de vos talents, mais surtout réformez votre politique migratoire.